Le big deal avec le linge – et avec les apparences en général

Le bien paraître et les considérations esthétiques occupent BEAUCOUP de place en Thailande. Avant de venir habiter ici, j’étais déjà au courant des chirurgies plastiques à rabais, des splendides ladyboys qui passent pour des femmes, et des petites filles over-maquillées qui font des shows de danse en minijupes dans n’importe quel centre d’achat et- ou dans n’importe quel parc. Mais depuis maintenant 7 mois, je prends pleinement conscience du phénomène. Combien de fois j’entends les mots “suai” (beau) et “mei suai” (pas beau) par jour? Sérieux, on enlève ces mots du vocabulaire Thai et il reste pas grand chose….Bon, ok, j’exagère, mais…

À l’école, on utilise le “suai- mei suai” à toutes les sauces. Que ce soit pour juger du travail des élèves (des vrais apprentissages jusqu’aux nombreuses “jobs de coloriage” données par les profs Thais- considérations esthétiques obligent…) ou pour commenter le outfit des autres profs, ou la sacoche, ou la coiffure, ou la couleur de peau (guess what, le blanc c’est “suai” comme ça se peut pas !) tout est sujet à être “beau” ou “pas beau”. Je sais, je sais… l’Amérique n’est pas à l’abri de l’obsession esthétique, mais ici ça prend des allures de concours de popularité d’école secondaire. Et c’est un peu beaucoup dichotomique comme façon de voir les choses.

Enfin… ça me surprend, venant d’un pays ou le bouddhisme domine. Mais je commence là aussi à voir comment les gens sont pratiquants pour la forme sans vraiment y croire… On me raconte des anecdotes de gens qui donnent de l’argent aux temples pour racheter leurs niaiseries (ou pour se donner la liberté d’en faire d’autres), de gens qui fréquentent assiduement les temples mais qui prient tout croche, enfin… pas vraiment différent des québécois qui fréquentaient l’église dans les années 60, I guess ?

Et il y a aussi la culture du dress code. Dans le Bouddhisme, chaque jour a une couleur différente, et ça se reflète dans ce que les gens portent. Le mardi est universellement jour mauve, le jeudi est le jour rouge, et dans la région ici, le vendredi est le jour du costume traditionnel Lanna. Ah oui, et le mercredi à l’école, c’est le jour des scouts! (celui-là, il vaut quand même la peine, juste pour voir des profs avoir l’air ridicules…)

En tant que foreign teachers, on nous épargne le scout outfit mais il faut quand même respecter un dress code, porter des jupes ou robes pour les madames et des pantalons noirs et chemises pour les monsieurs (de la bonne couleur autant que possible), et des souliers couverts noirs ou beiges de préférence (allo les pieds qui puent pendant la saison des pluies)… Et il y a les nombreuses journées thématiques où on doit porter du blanc nuage ou du bleu poudre ou du vert pomme, et qui – pour les élèves- sont prétextes à manquer des cours pour aller participer à des danses traditionnelles habillés en costumes traditionnels dans le main hall de l’école…

Bref, les compagnies d’uniformes et de location de costumes font de l’argent en criffe avec les parents, les compagnies de maquillage font de l’argent en criffe avec les madames et les ladyboys et les petites filles, et finalement les cliniques esthétiques font de l’argent en criffe avec toutes les madames Thaies qui veulent blanchir et les touristes qui se cherchent un lifting pour pas cher. Dans tout ça, je réussis quand même à refuser de me maquiller chaque jour (ok… j’ai cédé à la tentation du cache-cerne) et à continuer de porter du linge rétro de friperies. Je résiste aussi à la tentation de ne pas me fâcher quand mes interactions avec des collègues Thais se résument à recevoir des compliments sur la blancheur de ma peau (et une fois sur deux, à me faire demander de poser pour une photo). Parce que tsé, la beauté et la laideur, c’est relatif et il y a crissement autre chose dans la vie…

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